Fermes troglodytiques aux Goupillières
C’est un lieu insoupçonnable dans la vallée de l’Indre, à dix minutes en voiture d’Azay-le-Rideau. À l’accueil de la vallée troglodytique des Goupillières, la responsable des lieux, Amélie, raconte. L’acquisition du site, en 1962, par son grand-père agriculteur, désireux d’agrandir son exploitation arboricole, et l’exploration ludique de son père, alors enfant, qui fait de la vallée envahie de ronces un formidable terrain de jeux. Petit à petit, il y découvre des habitats troglodytiques.
Depuis le Moyen Âge, les coteaux de tuffeau étaient en effet exploités par des paysans l’hiver pour leurs pierres, qui servaient à la construction des châteaux. En l’occurrence, ici, celui d’Azay-le-Rideau. Pauvres, ils faisaient de ces cavités leur logement et y vivaient en autarcie. Amélie nous précise que les dernières familles quittèrent les lieux en 1905. Lorsqu’il hérite de cet endroit exceptionnel, son père décide de le valoriser et l’ouvre au public en 2000.
De fermes en fermes
Intrigués, nous entamons le circuit de visite dans une ferme troglodytique du 13e siècle surcreusée au 19e et transformée en cave à vin. Un couple d’hirondelles rustiques y a élu domicile et y niche en toute confiance !
Nous descendons les marches qui mènent au potager et découvrons la première ferme, une pièce unique avec sa cheminée, son four à pain et un lit rudimentaire à paillasse. Ce lieu de mémoire verdoyant et enchanteur est idéal pour les enfants, qui y admirent aussi des objets anciens et des animaux de la ferme comme l’ânesse Câline ou l'oie de Touraine. Près de la 2ème ferme ronfle un cochon dodu, indifférent aux pommes qui lui tombent dessus !
Au cœur d’un souterrain refuge
Le clou de la visite se situe à l’étape suivante : un souterrain refuge, le dernier connu en Touraine, qui en compte 53. Creusé au 13e siècle, il servait à abriter les familles lors des brigandages et autres guerres. J’emboîte le pas de mon amie, lampe-torche en main, pour cette insolite exploration.
La famille se réfugiait dans une grande salle par un boyau vertical et emportait quelques vivres. Le goulot était caché par un tas de bois et la porte d’entrée était fermée par des rondins que l’assaillant devait briser. Il se retrouvait dans une petite salle de 1,40 m de hauteur qui le menait vers un couloir. Le trou que l’on découvre était une meurtrière reliée à une salle où veillait un gardien. Qu’un intrus se présente et il lui enfonçait un épieu dans le ventre !
La dernière ferme qui subsiste est plus rectangulaire et mieux aménagée. Des étagères y ont été installées et un cagnard rempli de braises permettait de réchauffer les aliments.
Azay-le-Rideau et son joyau de la Renaissance
Nous quittons ce site insolite touchés par l’histoire de ces paysans de l’ombre, dont beaucoup travaillèrent à l’édification du château d’Azay-le-Rideau. C’est donc tout naturellement que nous nous rendons dans cette petite ville, à 5 min en voiture, pour y déjeuner.
Puis nous prenons un café en terrasse devant l’église Saint-Symphorien, dont la première partie fut érigée au 11e siècle. Un panneau explicatif montre comment elle fut agrandie et modifiée au fil des siècles. Face à l’église, la halle du 19e a remplacé la halle médiévale et abrite des expositions.
Nous déambulons dans les rues de la ville jusqu’au château.
Dans les jardins du château
Le château se situe en pleine ville et est entouré d’un beau parc romantique. Ce chef d’œuvre du 16e siècle se dresse sur une île de l’Indre, laquelle alimente un miroir d'eau. D’ici, le point de vue sur l’église est tout à fait différent. Face au château, un coquet "Jardin des secrets" ouvert aux visiteurs abrite un conservatoire de légumes anciens tourangeaux, des aromates, des hôtels à insectes…
Notre journée étant bien chargée, nous décidons de faire quelques photos de la belle façade nord du château, récemment restaurée, avant de filer. Au centre, nous pouvons entrevoir l'escalier qui traverse tout le corps de logis. D’influence italienne, cet élément est le plus novateur du château d'Azay et l'un des plus anciens conservés.
À Cheillé, un chêne classé "Arbre remarquable"
Nous repartons vers le village de Cheillé, à 10 min en voiture, où nous attend une nouvelle curiosité. Un impressionnant chêne tricentenaire a poussé dans les murs épais de l’église Saint-Didier, construite au 12e siècle. Il a été classé "Arbre remarquable" en 2017.
Autres particularités de l’église : son "caquetoir", une petite galerie où l’on peut "caqueter" à l’abri à la sortie de la messe et un Christ en croix du 16e siècle, au visage serein, classé aux Monuments Historiques.
Sur les pas de Rodin au château de l’Islette
Nous terminons cette journée au château de l’Islette, à 10 min en voiture. À 2 km d’Azay-le-Rideau, ce château Renaissance achevé vers 1530 ressemble à son illustre voisin, enserré lui aussi dans les bras de l’Indre.
On peut y louer une barque et les enfants (de 4 à 12 ans) se font un plaisir d’emprunter pour la visite l’un des nombreux costumes mis à leur disposition !
Un lieu de création et d’inspiration au bord de l'Indre
Outre le cadre enchanteur, ce qui m’attire en premier lieu ici est une histoire d’amour célèbre : celle de Camille Claudel et de Rodin, qui séjournèrent plusieurs fois au château au cours des années 1890. Rodin y travailla à son fameux Balzac, dont la statue lui fut commandée par la Société des gens de lettres. Je lis avec fascination la lettre en pleins et déliés encadrée dans le salon du rez-de-chaussée, où Camille Claudel invite son amant à la rejoindre au château. Ses réponses au questionnaire de Proust ne manquent pas non plus d’audace et de drôlerie !
À l’étage, nous sommes amusés par la cohabitation entre l’ancien et le contemporain. Après tout, une famille vit dans ce château et ce contraste le rend encore plus attachant.
Après l’étonnante salle de bains, la Grande Salle nous surprend par sa remarquable décoration picturale du début du 17e siècle, qui recouvre le plafond, les plinthes et la cheminée monumentale. Dans la cuisine sont affichées de nombreuses photos de famille !
De retour dans les jardins, nous contemplons l’élégante façade sud du château. Le parc est propice à la détente et offre de nombreux recoins pour se poser. Les visiteurs se prélassent au bord de l’Indre, à l’ombre d’arbres centenaires. Il est possible d’y pique-niquer et on peut même s’y abriter s’il pleut.
Au rez-de-chaussée de l’ancien moulin, qui abrite la boutique, nous nous attablons à la terrasse de la buvette.
Promis, nous reviendrons pour l’une des soirées "L’Islette à la belle étoile" proposées durant l’été. Le principe : on pique-nique dans le parc qui, à la nuit tombée, s’illumine de 1 000 bougies. Ne reste plus qu’à se laisser bercer par le concert en plein air.