Chênehutte-trèves-Cunault©N. Van Ingen_propriété du Parc naturel régional utilisation interdite

L'architecture religieuse

Abbaye, église ou Prieuré témoignent encore aujourd’hui sur le territoire du Parc de la présence ancienne de communautés religieuses au pouvoir grandissant. Les nombreux édifices visibles représentent aussi d’émouvants témoignages de l’art roman ou du célèbre l’Art gothique angevin.

Le territoire du Parc Loire-Anjou-Touraine compte de très nombreux édifices religieux, héritage des anciennes abbayes et prieurés installés dès le IVe siècle. Tout au long du Moyen Âge, ces communautés religieuses organisent le développement agricole, artistique et intellectuel. Elles ordonnent le défrichement des forêts pour y installer l’élevage et les cultures, encouragent par leurs commandes le développement des arts et de l’artisanat…
Les plus anciennes de ces fondations monastiques remontent aux premiers siècles de la chrétienté : prieuré de Cunault, abbaye St-Mexme de Chinon, abbaye de Saint-Maur-de-Glanfeuil. Les plus puissantes sont les abbayes de Bourgueil, de Saint-Florent-lès-Saumur et de Fontevraud. 
L’essor économique et démographique de la région entraîne la création de bourgs ; chacun s’organisant autour de son église. Nombre de ces édifices sont encore visibles aujourd’hui : leurs façades romanes ou gothiques offrent au visiteur un véritable voyage dans le temps. Art roman et art gothique présents dans toute l’Europe Occidentale, mais développent localement des spécificités :

  • L’art roman (Xe siècle – seconde moitié du XIIe siècle) est marqué par des influences extérieures, généralement venues du Sud par les axes de communication que sont la Vienne et le Thouet. Les sculpteurs s’inspirent des œuvres poitevines ou saintongeaises (ancienne province d’Aquitaine). Localement, l’art roman est donc un véritable « art de confluences », dont les plus beaux exemples sont l’église Notre-Dame-de-Cunault, l’église romane Saint-Nicolas de Tavant ou le prieuré Saint-Léonard de l'Ile-Bouchard. A l’abbaye de Fontevraud, les coupoles rappellent celles de la cathédrale d’Angoulême...
  • L'art gothique (XIIe – XVe siècle) régional est d’une grande originalité : il se caractérise notamment par l'usage de voûtes d'ogives très bombées. Les collégiales de Candes-Saint-Martin et du Puy-Notre-Dame, les églises Saint-Pierre de Saumur, Saint-Maurice de Chinon ou Saint-Germain de Bourgueil sont des œuvres notoires de cette période.

La Renaissance (fin du XVe siècle –XVIe siècle) lègue d'autres chefs-d’œuvre, comme la Sainte Chapelle de Champigny-sur-Veude et ses superbes vitraux.

Plus tard, la Contre-Réforme (XVIIe siècle) marque l’avènement de l’architecture classique. La chapelle royale Notre-Dame des Ardilliers de Saumur et sa gigantesque rotonde en sont l’une des plus belles illustrations. Au XIXe siècle, la prospérité de la vallée de la Loire s’exprime dans la construction d’édifices néoclassiques imposants, comme les églises de Saint-Clément-des-Levées ou de Saint-Mathurin-sur-Loire.
 

Abbaye royale de Fontevraud©PNRLAT

Le rôle économique des monastères au Moyen Âge

Soutenus et protégés par les seigneurs locaux qui leur attribuent des terres, les monastères jouent un rôle crucial dans le développement du territoire. Leur implantation entraîne la fixation de la population et donc l’essor des bourgs. À leur initiative, les forêts alluviales, en bords de fleuve et rivières, sont défrichées au 12e siècle pour y installer élevage et cultures.

Pour entreposer la part des récoltes qui leur est due, les établissements monastiques font ériger des granges dîmières. Les paysans viennent y apporter leurs redevances en nature, les dîmes, qui correspondent au dixième de leurs récoltes. La grange de Trèves et la grange de Cunault, situées à Saint-Clément-des-Levées, ainsi que celle du Plessis-aux-Moines à Chouzé-sur-Loire en sont les derniers témoignages. 

Le rôle économique des monastères ne s’arrête pas là : ils prélèvent également des taxes et impôts sur les biens vendus sur les marchés ou transitant par la Loire. Les fonds qu’ils recueillent servent notamment à construire et entretenir les édifices religieux, les bâtiments commerciaux, les ouvrages tels que les ponts…
Le rayonnement de ces communautés religieuses est considérable. Siège de l’ordre fontevriste, l’abbaye de Fontevraud est dirigée par une abbesse, à la tête d’un réseau qui se déploie jusqu’en Angleterre ou en Espagne ! Cette situation dure jusqu’à la Révolution Française : l’ordre est alors supprimé, et l'abbaye transformée en prison.

Un art roman de confluences

Dès le 11e siècle, se développent des formes artistiques et architecturales originales, marquées par les influences poitevines et saintongeaises, voire berrichonnes. Les nombreuses voies terrestres et fluviales qui traversent l’actuel Parc Loire-Anjou-Touraine facilitent les échanges en tous genres, notamment culturels et artistiques.
Ces influences sont particulièrement visibles sur certains chefs-d’œuvre de l’époque :

  • L’église prieurale Notre-Dame de Cunault emprunte à la sculpture romane du Sud-Ouest. Ses 223 chapiteaux sculptés constituent, l’un des plus impressionnants ensembles de la région.
  • L’église abbatiale de Fontevraud présente une majestueuse nef à file de coupoles construite au milieu du 12e siècle et directement inspirée de la cathédrale d’Angoulême. Ce décor abrite les gisants d’Henri II Plantagenêt, Aliénor d'Aquitaine, Isabelle d'Angoulême et Richard Cœur de Lion.
  • Le prieuré Saint-Léonard à L'Ile-Bouchard n’offre plus que des vestiges, mais on peut encore observer de remarquables chapiteaux sculptés marqués par l'art poitevin.
  • La petite crypte de l’église Saint-Nicolas de Tavant vaut le détour. Elle est recouverte de peintures murales datant du début du 12e siècle qui constituent un des chefs-d’œuvre de cette époque en France. 
  • La richesse et la diversité de l’art roman s’incarnent aussi bien dans ces œuvres que dans la multitude de bâtiments religieux aux proportions plus modestes qui jalonnent le territoire.

Le charme des villages ruraux du Parc Loire-Anjou-Touraine doit beaucoup à ce chapelet de petits édifices. Parmi eux, les tours romanes de Saint-Georges-du-Bois, de Saint-Georges-des-Sept-Voies ou de Saint-Germain-sur-Vienne, le clocher tors (flèche de charpente en spirale) de Fontaine-Guérin, les fresques romanes de l’église Saint-Martin à Lignières-de-Touraine, les églises de Blou, de Brion ou de Parçay-sur-Vienne...

église de Tavant
L'église de Tavant abrite une crypte datant du 12ème siècle

L'originalité de l'art gothique angevin

Né en Île-de-France au milieu du 12e siècle, l’art gothique se substitue petit à petit à l’art roman. Dans l'Ouest (Anjou-Maine-Touraine-Poitou), il connaît un développement singulier, jusqu’à devenir un style particulier.

L’art gothique de l'Ouest (autrefois appelé Angevin ou Plantagenêt) se distingue par l’utilisation de voûtes d’ogives très bombées, bien plus que celles des églises franciliennes. On reconnaît dans cette particularité l’influence de la coupole romane du Sud-Ouest. 

Les monuments religieux sont généralement composés d’une nef unique, sans bas-côtés. Les églises présentent souvent des chevets plats, sans abside et sans déambulatoire, comme à Bourgueil, Saint-Germain-sur-Vienne ou Sazilly.

Les ogives permettent une meilleure répartition du poids de la voûte et l’allègement de l’ossature des édifices religieux. Mais l’art gothique angevin va plus loin dans cette impression de légèreté : les habituels arcs-boutants sont remplacés par de simples contreforts, et les nervures des voûtes, ainsi que leurs supports, s’affinent progressivement.
Dans l’art gothique de l'Ouest, la sobriété des façades extérieures contraste avec le raffinement des clés de voûtes et chapiteaux sculptés. Il faut franchir le seuil de ces édifices pour en admirer toute la beauté !

Les plus remarquables du territoire sont :

  • La collégiale de Candes-Saint-Martin : cette église de pèlerinage est certainement l’une des plus belles illustrations de ce courant artistique, avec sa nef à trois vaisseaux et son porche ouvert sur la Vienne.
  • Les églises Saint-Pierre de Saumur et Saint-Maurice de Chinon figurent parmi les plus beaux spécimens urbains de l’art gothique de l'Ouest.
  • La collégiale du Puy-Notre-Dame : dominant le vignoble depuis son promontoire, elle ressemble à une cathédrale échouée en pleine campagne.

 

vue sur le tympan de la collégiale du Puy-Notre-Dame
Tympans de la collégiale du Puy-Notre-Dame

 

Saints patrons et corporations professionnelles

Dans le Val de Loire, les bateliers se vouent à plusieurs saints, notamment saint Clément qui est le patron des mariniers, et saint Nicolas. Les carriers, eux, s’en remettent à saint Pierre : on trouve son effigie dans de nombreuses paroisses du Saumurois où l’on extrait le tuffeau et le falun. Il est aussi parfois le patron des pêcheurs en Loire.

Mais la grande protectrice de la vallée, de ses cultures et de ses habitants reste la Vierge Marie. On la retrouve partout sur le territoire, aussi bien dans les grands sanctuaires que dans les oratoires (petites chapelles dites « de mariniers ») des bourgs situés sur la levée de la Loire. La collégiale Notre-Dame du Puy-Notre-Dame, l'église Notre-Dame de Nantilly et la chapelle royale Notre-Dame des Ardilliers à Saumur furent d’ailleurs parmi les plus grands lieux de pèlerinage dédiés à la Vierge dans l'Ouest de la France.

Dans les églises de La Chapelle-sur-Loire et de Chouzé-sur-Loire, on peut admirer une autre manifestation de la foi des bateliers. Les maquettes de navires accrochées à leur voûte datent du 19e siècle. Ce sont des ex-voto, offrandes faites en demande ou en remerciement d'une grâce. Tandis qu’à Chênehutte, trônent un don des mariniers un cierge orné d’un bateau de Loire, ainsi qu’un autre décoré d’un tailleur de pierre, offert par les carriers cette fois.

Pour ces corporations professionnelles à la foi inébranlable, rien n’est trop beau pour orner les monuments religieux. Dans la seconde moitié du 19e siècle, les vanniers (qui travaillent l’osier) de Villaines-les-Rochers et leur curé dotent l’église Saint-André de somptueuses peintures murales. Leur entreprise voit le jour grâce au soutien financier de l’impératrice Eugénie, fervente catholique et passionnée d’arts.
 

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